Table discrète mais qui ne manque pas d’ambition, le cocon gourmand du chef Thierry Schwartz a tout pour plaire : la belle maison typique, le beau discours, un joli menu qui donne faim. Que vaut-il vraiment ? Atabula y est allé manger.
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L’environnement
Dans le village d’Obernai, une belle façade discrète, joliment éclairée. Une porte pleine, en bois. Comme l’impression de rentrer chez un particulier. Immédiatement, on se sent bien, dans une bulle d’intimité avec, au fond, la cheminée et les braises pour cuire quelques produits.

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Le cadre intérieur
Une petite salle intimiste bien pensée, beaucoup de bois aux murs, au plafond, les chaises, les tables… Un joli plafond éclairé avec des feuilles en guise de décoration. Rien d’ostentatoire, rien d’agressif : un grand sentiment de douceur très… naturelle.

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Le service
Féminin, masculin, un joli tatouage qui passe discrètement, des sourires, des accents, un professionnalisme de proximité qui touche comme il faut. En belle cohérence avec le lieu et la cuisine.
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L’assiette
La table de Thierry Schwartz revendique « la cuisine nature ». « J’aime me dire que le produit se suffit à lui-même dans son élégance naturelle » peut-on lire sur son site Internet. Il y a tellement de chefs qui s’affichent « nature », locavore, respectueux de tout, donc de rien, mettant en avant leur potager, leurs producteurs et leur terroir que l’on attend de voir si le discours colle à la réalité culinaire. Et là, il ne faut pas longtemps pour comprendre que la cohérence entre la parole affichée et l’engagement concret est totale. La relation réelle avec les producteurs, la connaissance intime du terroir et les convictions profondes du chef se ressentent illico dans son premier plat, « Tétragone cornue de Christian, figues séchées ». Une ode à l’évidence, au végétal éclatant et à la finesse des textures ; un grand plat faussement simple (et avec un produit rare aujourd’hui) qui augure un menu ciselé, savamment pensé et exécuté à la perfection. Le deuxième plat, « Potimarron de l’Abbaye de Truttenhausen, noisettes fraiches » n’est que gourmandise régressive. Après le plat signature de « L’oeuf dans l’oeuf de Monsieur Humbert, cèpes des Vosges », la proposition autour de la « Truite blanche de Source de du Heimbach, moelle de boeuf » prouve que Thierry Schwartz ne se contente pas de jouer les séducteurs ; il sait provoquer en mélangeant une poche d’oeufs de truite, de la moelle et une texture si singulière avec une forte présence de collagène. Et que dire du ris de veau, cuit devant la braise, accompagné d’un duo de céleri : envoûtant. La pause fromagère – un joli fromage travaillé – et les deux desserts de cuisinier – du maïs doux pour l’un, de l’oignon noir pour l’autre – maintiennent un niveau culinaire très élevé, tout en cohérence et en puissance.











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Côté cave
1 200, 1 600, « plutôt 1 700 aujourd’hui » ; on a du mal à savoir combien il y a de références en cave. Une seule certitude : voilà l’une des plus belles et imposantes cave de vins « nature » en France, en Europe, voire au monde. Le chef et son sommelier aiment boire, aiment acheter et aiment faire déguster leurs trésors. De quoi rendre fou n’importe quel amateur ! À noter également un accord mets et boissons non alcoolisées, « l’un des premiers » en France dit-on.
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L’expérience globale
Sincérité, simplicité, cohérence globale, belles assiettes percutantes, gourmandes mais sans chercher constamment la facilité ni même le consensuel, difficile de ne pas ressortir de chez Thierry Schwartz séduit, voir conquit.
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La table et les guides
Une étoile rouge (depuis 2003) et une étoile verte du côté du Bibendum ; trois toques et un 16/20 au Gault&Millau.
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Pratique | Lien vers le restaurant Thierry Schwartz
Photographie | DR